Quand on prend un médicament, il ne suffit pas de savoir combien on en prend. Il faut aussi savoir quand on le prend - et surtout, si l’estomac est vide ou plein. Cette distinction, appelée état jeûne versus état nourri, n’est pas une simple précaution. C’est une exigence réglementaire dans 65 % des essais de bioéquivalence modernes, et elle change radicalement la façon dont le corps absorbe les substances. Pourquoi ? Parce que votre estomac ne fonctionne pas de la même manière quand vous venez de manger qu’après une nuit sans rien avaler.
Dans l’état jeûne, votre système digestif est au repos. L’estomac est presque vide, le pH est plus acide (autour de 2,5), et le temps de rétention gastrique est court - environ 14 minutes en moyenne. C’est le moment où les médicaments lipophiles, comme le fénofibrate, peuvent être absorbés plus lentement, mais de manière plus prévisible. En revanche, certains médicaments, comme la griséofulvine, voient leur absorption chuter de 50 à 70 % dans ce contexte. Pourquoi ? Parce qu’ils ont besoin de lipides pour se dissoudre correctement.
Dans l’état nourri, tout change. Après un repas riche en graisses - typiquement 800 à 1 000 kcal, dont 500 à 600 kcal provenant des lipides - l’estomac se remplit, le pH descend à 1,5, et le temps de rétention augmente jusqu’à 78 minutes. Les bile et les enzymes se mettent en mouvement. Pour certains médicaments, c’est un boost : la bioavailability peut doubler ou tripler. C’est exactement ce que l’Agence européenne des médicaments (EMA) et la FDA exigent aujourd’hui : tester les médicaments dans les deux conditions. Pas pour faire compliqué, mais parce que 35 % des molécules nouvellement approuvées montrent des différences cliniquement significatives selon l’état de l’estomac.
Un repas de test n’est pas n’importe quel repas. Il est strictement défini : gras, calorique, et standardisé. Une étude de 2019 sur 1 200 nouvelles molécules a montré que 42 % d’entre elles avaient une absorption modifiée de plus de 20 % en état nourri. Pour un médicament à marge étroite - comme la cyclosporine ou la warfarine - une variation de 20 % peut signifier une overdose ou un échec thérapeutique. C’est pourquoi les laboratoires doivent reproduire ce repas à ±10 % près dans chaque essai. Pas de pain blanc, pas de yaourt light. Un œuf, du beurre, des céréales complètes, du lait entier. Rien de plus, rien de moins.
Et ce n’est pas fini. Depuis 2023, la FDA demande aussi que ces tests incluent des populations ethniques différentes. Des recherches ont montré que les personnes d’origine asiatique ont un temps de vidange gastrique plus lent de 18 à 22 % en état nourri que les caucasiens. Cela signifie qu’un médicament qui marche bien chez un patient européen peut ne pas être efficace chez un patient chinois ou vietnamien - si on ne teste pas dans les deux conditions.
Le même principe s’applique au sport - mais avec des objectifs différents. En état jeûne, après 8 à 12 heures sans manger, votre corps brûle davantage de graisses. Les acides gras libres augmentent de 30 à 50 %. Cela peut sembler idéal pour perdre du poids. Mais cela a un prix : votre capacité à faire un effort intense chute de 12 à 15 %. Un sprint, une séance de HIIT, une course rapide ? Vous allez vous épuiser plus vite.
En état nourri - avec 1 à 4 g de glucides par kg de poids corporel consommés 1 à 4 heures avant l’effort - vous avez plus de glycogène. Votre endurance augmente de 8,3 % sur des efforts de plus de 60 minutes. C’est pourquoi les athlètes de haut niveau, comme Scott Jurek, coureur d’ultra-trail, préfèrent s’alimenter avant l’entraînement. Mais pour une personne sédentaire qui veut améliorer sa sensibilité à l’insuline, l’état jeûne peut être plus efficace : 14 études contrôlées ont montré une amélioration de 5 à 7 % après plusieurs semaines.
Et pourtant, une étude de 2021 a révélé une surprise : après six semaines d’entraînement, les deux groupes - jeûne et nourri - avaient perdu la même quantité de graisse. Ce qui change, c’est la manière dont le corps y arrive. L’état jeûne active des gènes comme PGC-1α, qui favorisent la création de nouvelles mitochondries. L’état nourri, lui, protège les muscles de la dégradation. Ce n’est pas une question de « meilleur », mais de « adapté ».
Beaucoup de gens sur les réseaux pensent que faire du sport à jeun est la clé pour fondre. Une enquête sur Reddit montre que 42 % des adeptes du régime cétogène préfèrent cette méthode pour perdre du gras. Mais 31 % disent avoir des étourdissements, et 22 % constatent une baisse d’intensité. Ce n’est pas un signe de « force mentale ». C’est un signe que le corps manque de carburant.
À l’inverse, croire que manger avant chaque entraînement est toujours mieux est aussi une erreur. Pour un marathonien, oui. Pour une personne qui fait du vélo à 15 km/h le dimanche matin ? Pas nécessaire. Et dans les essais pharmaceutiques, simuler un « repas réel » est impossible. Les gens mangent des hamburgers, des pâtes, des fruits, du café noir. Les laboratoires ne peuvent pas tester chaque combinaison. C’est pourquoi ils se basent sur des protocoles standardisés : un repas précis, une heure précise, un délai précis. La réalité du consommateur ? Elle est plus complexe. Et c’est pour ça qu’on teste les deux états.
La science avance. En 2022, une étude a montré que 33 % des différences de réponse à l’entraînement jeûne ou nourri dépendent d’un gène : PPARGC1A. Certaines personnes sont naturellement plus adaptées à brûler les graisses à jeun. D’autres ont besoin de glucides pour performer. Ce n’est plus une question de mode, mais de génétique.
Dans les laboratoires, les nouvelles technologies permettent de suivre la glycémie en continu pendant les tests nourris. On sait maintenant que la réponse métabolique à un repas n’est pas la même pour tout le monde. Ce qui est vrai pour un jeune homme en bonne santé ne l’est pas pour une femme ménopausée ou un diabétique. La réglementation suit. L’EMA a intégré ces données dans ses directives de 2024.
Le message est clair : il n’y a pas de « bonne » condition. Il y a la bonne condition pour le contexte. Pour un médicament, c’est la loi. Pour un entraînement, c’est une stratégie. Pour votre santé, c’est une question d’écoute.
Parce que la présence de nourriture dans l’estomac change la vitesse et l’ampleur de l’absorption de nombreux médicaments. Certains deviennent plus efficaces, d’autres moins. Pour des médicaments à marge étroite, une variation de 20 % peut être dangereuse. Les agences comme la FDA et l’EMA exigent ces deux tests pour garantir que la dose prescrite fonctionne dans les conditions réelles de prise - que le patient soit à jeun ou après un repas.
Sur le court terme, oui : votre corps brûle plus de graisses pendant l’effort à jeun. Mais sur le long terme, les études montrent que la perte de gras totale est similaire entre les deux méthodes. Ce qui change, c’est la manière dont votre corps s’adapte. À jeun, il améliore son efficacité à brûler les lipides. Après un repas, il préserve les muscles. Le choix dépend de vos objectifs : santé métabolique ou performance.
Un repas riche en graisses, d’environ 800 à 1 000 calories, dont 500 à 600 calories proviennent des lipides. Il contient typiquement des œufs, du beurre, des céréales complètes, du lait entier et des fruits. Ce repas est standardisé pour être identique dans tous les essais, afin d’assurer la reproductibilité des résultats. Il ne s’agit pas d’un repas « normal », mais d’un protocole scientifique.
Oui. Des études ont montré que les personnes d’origine asiatique ont un temps de vidange gastrique plus lent de 18 à 22 % après un repas que les personnes d’origine caucasienne. Cela signifie que certains médicaments peuvent être absorbés plus lentement ou de manière différente. Depuis 2023, la FDA exige que les essais de bioéquivalence incluent des participants de diverses origines ethniques pour éviter les biais de traitement.
Non. Si vous faites un effort modéré de moins de 60 minutes, l’état jeûne ne nuit pas à la performance. Si vous faites du HIIT, de la course rapide ou un entraînement de plus de 60 minutes, un repas léger 1 à 4 heures avant améliore la capacité à tenir l’effort. Le choix dépend de l’intensité, de la durée et de vos objectifs. Il n’y a pas de règle universelle.
Ohhh mon dieu enfin quelqu’un qui parle comme un humain 😭 Je viens de perdre 3h à lire des trucs sur la bioéquivalence et je pensais que j’étais la seule à avoir envie de jeter mon ordi par la fenêtre. Merci pour ce texte, j’ai même compris les trucs avec la cyclosporine 😍👏
Vous avez tous l’air de croire que la FDA et l’EMA sont des autorités sacrées. Pourtant, leur méthode standardisée de repas gras est une absurdité biomédicale conçue par des labos pour justifier des prix exorbitants. Le vrai problème ? Ils testent sur des Blancs de 25 ans et prétendent que ça marche pour tout le monde. C’est du colonialisme pharmaceutique, pas de la science.
Si tu prends un médicament à jeun, fais-le à jeun. Si tu dois le prendre avec un repas, mange un petit truc. Pas la peine de se compliquer la vie. Ton corps sait ce dont il a besoin. 💪
Et puis quoi encore ? Maintenant on va tester les médicaments sur les Chinois, les Sénégalais, les Vietnamiens… On va finir par avoir 500 versions du même comprimé. Chez nous, en France, on a déjà du mal à faire respecter les règles de base. Allez donc voir comment ils prennent leurs médicaments à Marseille, pas besoin de faire des études sur 12 ethnies.